Retour au haut de la page

Nous avons sélectionné Ontario pour vous. Ce n’est pas le bon lieu? Vous pouvez le changer à tout moment.

Revenu passif : la petite bête noire fiscale des entrepreneurs - SFL - DSFRI

Revenu passif : la petite bête noire fiscale des entrepreneurs

Les règles fiscales sur le revenu passif, entrées en vigueur il y a deux ans, causent parfois des maux de tête aux propriétaires de PME. Voici quelques stratégies qui pourraient aider à mieux les gérer.

07 avril 2021

Depuis la réforme fiscale de 2019, les propriétaires de PME canadiens ont appris à voir sous un autre jour les revenus qu’ils tirent des placements faits par leur entreprise. En tant que « revenus passifs », ceux-ci sont en effet soumis à des règles qui rendent de tels investissements moins attrayants dans un cadre corporatif. Dans les faits, ces règles pourraient en inciter plusieurs à « sortir » les fonds de leur entreprise pour les investir personnellement – après, cependant, avoir assumé une facture d’impôt immédiate souvent assez lourde. Il pourrait cependant exister d’autres options.

Mais pour les comprendre, rappelons d’abord en quoi consistent ces règles.
 

Revenu passif et déduction pour petite entreprise

La réforme fiscale est venue créer un lien entre le revenu passif d’une entreprise et le taux auquel sont imposés ses revenus actifs, c’est-à-dire ses revenus d’exploitation. Ces derniers, en effet, bénéficient d’un taux réduit, connu sous le nom de déduction pour petite entreprise (DPE), pour la partie de leurs bénéfices située sous un certain plafond, lequel est actuellement de 500 000 $. Alors que le taux général des entreprises, pour les deux paliers de gouvernement, oscille entre 23 % et 31 % selon la province, ce « petit taux », comme l’appellent les experts-comptables, peut être d’aussi peu que 9 à 14 %.

Or, les règles sur le revenu passif font en sorte que ce plafond est graduellement abaissé, dans un facteur de 5 pour 1, pour chaque dollar de revenu passif qui dépasse 50 000 $. Par exemple, un revenu passif de 60 000 $ diminuera la DPE de 50 000 $ ([60 000 - 50 000] x 5) et la ramènera donc à 450 000 $. Le tableau suivant fournit quelques exemples de plus. Comme on peut le voir, au-delà de 150 000 $ de revenu passif, l’entrepreneur n’a tout simplement plus droit au « petit taux » des PME.

Tableau illustrant de quelle façon le revenu passif d’une entreprise diminue son admissibilité à la déduction pour petite entreprise (ou DPE), qui est de 500 000 $. La formule consiste à prendre toute somme de revenu passif dépassant 50 000 $, et de la multiplier par cinq. Par exemple, des devenus passifs de 100 000 $ diminueront la DPE de 250 000 $, c’est-à-dire 100 000 $ moins 50 000 $ multiplié par cinq. À 150 000 $ de revenu passif, le résultat est de 150 000 moins 50 000 $ fois cinq, c’est-à-dire 500 000 $. Cela signifie que l’entreprise n’a plus droit du tout à la DPE.

Des conséquences financières potentiellement très importantes

Si elles peuvent sembler sans conséquence pour un jeune entrepreneur qui a peu de bénéfices d’exploitation et encore moins de revenus de placement dans son entreprise, il en va autrement pour celui qui, après des années de labeur, réussit à dégager des sommes importantes de son exploitation et choisit de les laisser dans son entreprise (ou sa société de gestion) pour les investir.

Le graphique suivant illustre la situation fictive d’un entrepreneur prospère qui aurait dans son entreprise des placements de 1 500 000 $ générant un rendement annuel de 4 % ; dégagerait un bénéfice d’exploitation de 500 000 $ par année ; et ajouterait à son portefeuille de placements une somme de 250 000 $ par année. Comme on peut le voir, la portion de ses revenus d’exploitation bénéficiant de la DPE diminue chaque année, et la part soumise au taux plus élevé augmente. La première année, il se retrouvera à payer 6 750 $ de plus en impôts que si ses revenus d’exploitation étaient restés soumis au « petit taux ». Après cinq ans, il aura payé au-delà de 100 000 $ de plus en impôts.

Graphique illustrant la composition de la facture d’impôt d’une PME fictive qui a des bénéfices d’exploitation de 500 000 $ et des investissements de 1,5 million $, lesquels augmentent de 250 000 $ par année. Le taux de rendement des placements est de 4 %. Le graphique permet de voir qu’en raison des revenus passifs qui augmentent, la part des revenus qui sont soumis au taux général des entreprises croît et celle qui profite du « petit taux » diminue. À la cinquième année, l’entrepreneur se trouve à payer plus de 66 000 $ d’impôt au taux général et seulement 32 500 $ au petit taux.

Des pistes de solution

Dans la mesure du possible, l’entrepreneur aurait donc intérêt à minimiser ses revenus passifs pour préserver sa DPE. La façon la plus simple serait évidemment de se verser personnellement une partie de ces revenus, ce qui entraînera un impôt personnel immédiat, mais pourrait être une stratégie valable si l’objectif est de maximiser son REER et/ou son CELI – donc d’accumuler des actifs à l’extérieur de la société. Cependant, d’autres approches consistent à recourir plutôt à des véhicules d’accumulation d’actif qui ne sont pas considérés comme générant un revenu passif.

Il en existe trois principaux types.

  • Les solutions d’assurance
    Entre autres avantages, une assurance vie détenue par l’entreprise pourrait permettre une accumulation des valeurs à l’intérieur du contrat et à l’abri de l’impôt, en plus de verser un capital-décès également non imposable.
  • Les solutions de placement fiscalement performantes
    Certains types de fonds communs de placement, dits « constitués en société », sont conçus de façon à reporter et à atténuer la charge fiscale annuelle.
  • Le régime de retraite individuel (RRI)
    Un régime de retraite individuel est un peu l’équivalent d’un fonds de pension agréé, mais que l’entrepreneur met en place pour lui-même. Parmi ses nombreux avantages, l’argent qui y est investi s’accumule à l’abri de l’impôt, comme dans un REER, et n’a donc pas d’incidence sur le revenu passif.

Une option encore plus performante pourrait évidemment être de combiner les trois stratégies, en plus de procéder de façon ordonnée à des retraits permettant de transférer des actifs au propriétaire de l’entreprise, qui les investira dès lors sur une base personnelle. Il faut savoir cependant que ces trois options peuvent être relativement complexes et parfois coûteuses, notamment dans le cas du RRI.

Il pourrait donc être essentiel de consulter son conseiller en sécurité financière, son représentant en épargne collective et son comptable pour décider de la meilleure marche à suivre.